Blog littéraire

Solénoïde de Mircea Cartarescu

Solénoïde

Quelle claque ! Ce livre hypnotique est un monument et son auteur un grand écrivain, un maître de la littérature, j’en suis toute éblouie !

Pourtant ce n’était pas gagné au départ : un pavé de 800 pages présenté comme le « journal halluciné d’un homme ayant renoncé à devenir écrivain », entre univers kafkaïen, allégories, métaphysique et réalisme, je ne savais pas si j’accrocherais tellement la frontière entre rêve et réalité est poreuse tout au long du livre.

J’ai pourtant accédé à un autre monde littéraire et je vois ce livre comme une porte d’entrée vers des univers que jusqu’ici je n’avais encore jamais exploré.

Cette phrase résume assez bien la longue quête existentielle qui torture l’auteur tout au long du livre (et de sa vie ?…) : « Qu’est ce monde ? Dans quelle folie solidifiée et étrange m’est-il donné de vivre ? Vais-je survivre assez longtemps pour trouver la réponse ? Pour trouver la sortie ? Comprendrai-je un jour, du fond de ma solitude, cet appareil d’un autre monde qu’est ma vie ? »

Dès le début, malgré l’étrangeté du récit, l’écriture de Mircea Cartarescu m’a percutée par sa force et sa virtuosité. La maîtrise des mots est stupéfiante, amateurs de belles lettres foncez ! Certains passages sont un peu ardus car l’auteur se perd dans les circonvolutions de son monde intérieur, mais il nous y entraîne le bougre ! Et parfois nous égare pour mieux nous rattraper à la page d’après… pour vraiment apprécier il faut accepter l’immersion.

Faire un pas de côté et s’interroger sur le sens de l’existence, échapper au tunnel d’obligations qui nous font tourner en rond comme une souris dans un labyrinthe, voilà probablement quelques unes des pistes que nous apporte la lecture de ce livre majeur.

Ça a été pour moi une réelle découverte, fortuite qui plus est, puisque ce livre au départ a été offert à mon fils, mais je suis ravie d’avoir été curieuse. Comme le dit M. Cartarescu les livres sont des fentes magiques à travers lesquelles on peut apercevoir le cerveau des autres (il le dit bien mieux mais c’est l’idée!) : il en fait lui-même une belle illustration.

NB : je souligne aussi l’extrême finesse de la traduction.

« Le fait que je ne sois pas devenu écrivain, que je n’aie aucune importance dans le monde extérieur, que rien de lui ne m’intéresse, que je n’aie pas d’ambitions ni de besoins, que je ne me leurre pas moi-même en dessinant « avec sensibilité et talent » sur les murs lisses du labyrinthe des portes qui ne s’ouvriront jamais, me donne une chance unique, ou peut-être la chance de tous ceux qui sont seuls et oubliés : celle d’explorer les vestiges étranges de mon propre cerveau tels qu’ils m’apparaissent au fil interminable des soirées où, dans l’ombre qui descend progressivement sur ma chambre silencieuse, mon cerveau se lève comme la lune et rayonne avec de plus en plus de force. Je vois alors à sa surface des palais et des mondes cachés, qui restent invisibles à ceux qui trottent dans le labyrinthe, obsédés par le petit morceau de fromage, sans un moment de répit, convaincus que c’est tout ce qui leur est échu en ce monde et qu’il n’y a rien, de l’autre côté des parois blanches et courbes. »

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